le silence et c'est tout

Publié le par Jissey.Moro

 

        

 

         Le silence et c'est tout. Ici, les maisons sont vidées de leur chair, comme les automobiles. Carapaces abandonnées en juin 1944. Nous sommes en 2009
Le so
leil de ce début d'automne donne à ce lieu de martyre une cruelle beauté;
la rouille, la pierre, le bois des piquets qui gardent ce troupeau de squelettes
Tout ici prend le temps de se patiner, se vide du superflu pour laisser à nos regards incrédules, la place d'imaginer ce que fut cette journée de désastre,
de feu, de terreur absolue.Pompéï orchestré par Néron.Promenade étrange en compagnie d'une jeune allemande qui a souhaité visiter ce lieu de mémoire.
Beaucoup de courage, un peu de gêne. Sa blondeur insolente sur ce lieu désolé
oblige à se retenir de parler haut, comme si au dessus des décennies planait encore une menace dans cet accent pourtant léger...
C'est seulement en quittant le lieu que la jeune fille arrivera à extérioriser un sentiment de culpabilité, à évoquer le travail de mémoire que le système éducatif allemand propose à ses enfants. Difficile de lui expliquer que l'horreur aujourd'hui présentée devant elle
n'est pas à proprement parler celle de son peuple mais qu'il s'agit de ce dont tout homme a été capable... est capable... sera capable... Par avidité, gout du pouvoir ou de la gloire. Par folie, qu'il l'accepte ou le nie, le repousse ou s'en réjouisse. Cette rouille que le vent du limousin fouette, caresse, uniformise et enchâsse peu à peu dans son granit nous pousse à chaque pas insidieusement,
vers le silence et c'est tout.


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J
Un homme à qui on a aussi fermé les portes de la créativité paraît-il. Que faire des pulsions imaginaires, des émotions incomprises, lorsque leur canalisation est interdite. Que serions-nous, toi, moi et les autres, fabricants d'images, de mots et de sons qui reflètent nos doutes, nos frustrations, nos vides, nos colères, nos idéaux, nos euphories, nos excès, nos projections, nos idées reçues, nos intuitions, si l'on nous disait : "non, tu ne dois plus prendre ce pinceau, ce crayon, cette guitare car tu n'as pas de talent". Certes, l'art a quelque chose à voir avec l'esthétique, avec un message dirigé vers un interlocuteur universel, une fulgurance prémonitoire, mais il est aussi un moyen efficace de lutter contre la violence que l'on retourne vers soi ou vers les autres et dont les effets sont à petite et grande échelle catastrophiques. Je t'embrasse.
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